Au beffroi est une cloche de 1728.
Elle porte en capitale l’inscription suivante : « In nomine Christi benedicta a Dno (pour Domino) tonne Lauzet parocho hujus ecclesiae sti (pour sancti) Stefani vulgo Stephe patrinus meus Dnus (pour Dominus) Fr. Lambert de Fonfroide equies matrina Dna (pour Domina) Maria Mna (pour Magdalena) Souchet Schadenes -Anno MDCCXXVIII Barau fudit Torquatus ».
Traduction : « Au nom du Christ, j’ai été bénite par messire Jean Lauzet, prêtre de cette église de Saint Etienne, vulgairement appelée Estèphe, (étant) mon parrain monseigneur Fr. Lambert de Fontfroide, écuyer et messaine Dame Marie Magdeleine Souchet Schadenes ; l’an 1728, m’a fondue Barau maître ».
Fontfroide était un fief de la paroisse de Saint-Estèphe, situé au Sud-Ouest du bourg. En ce lieu existe encore une gentilhommière de la fin du XVIème siècle qui de longues années a appartenue aux Lambert. Fr., probablement François, prénom assez commun dans cette famille.
François Lambert, sieur de Fontfroide, en avait pris le titre et y demeurait. Les Lambert étaient une vieille et importante famille du pays, ayant fourni des présidents, des procureurs du roi au présidial d’Angoulême et à cette ville des échevins. Leur noblesse acquise par ces charges, fut confirmée par arrêt du 7 novembre 1668. Au XVIIème siècle, on retrouve des membres de cette famille à Lugeat, au Maine-Giraud, à Rochefort, à la Vouture, aux Andreaux et à Fontfroide ; deux lieux de la paroisse de Saint-Estèphe.
Quant à Marie-Magdeleine Souchet, son patronyme Souchet est suivi d’une marque dans la fonte laissant la place pour deux lettres. Celles-ci, selon nous, devraient être DE. Dans ce cas nous devrions lire « Souchet de Schadenes ». Ainsi orthographié Schadenes est inconnu en Charente ; ne serait-ce pas un lapsus du fondeur ? Nous trouvons, en effet, dans les titres de nombreux Souchet qualifiés de Chadennes, mais jamais de Schadenes. Or Chadennes est un hameau de la commune de Péreuil, situé près de la route de Barbezieux, entre le bourg de Péreuil et la ville de Blanzac, à 8 kilomètres de Saint-Estèphe. Ne peut-on pas croire Marie-Magdeleine Souchet originaire ou même dame de ce lieu ? Dans la famille Souchet se trouvent plusieurs lieutenants criminels au Présidial d’Angoulême et des échevins de cette ville. Cette famille tenait donc dans le monde le même rang social que celle des Lambert et comme cette dernière elle venait d’être confirmée dans sa noblesse par l’arrêté du 7 novembre 168(?).
Le qualificatif donné au fondeur Bareau « Torquatus » que nous traduisons par « maître » veut dire littéralement « porteur, décoré d’un collier d’honneur. Or cela est de notoriété publique, l’ouvrier reçu maître dans sa corporation, avait droit, en costume d’apparat, de porter un grand collier retombant sur la poitrine. Bareau porteur de ce collier avait donc été reçu maître dans sa profession.
Mais sans prénom il nous est difficile d’identifier d’une manière certaine l’auteur de notre cloche. Les Bareau sont légion dans la contrée. On en trouve dans toutes les positions sociales, artisans, fondeurs, échevins d’Angoulême ou même conseillers au Présidial de cette ville.
Bénitier, cloche et mesure à dîmes ajoutent à l’intérêt présenté par l’église de Saint-Estèphe, certainement l’une du département des plus attachantes par les souvenirs historiques qu’elle éveille et l’étude des remaniements cachés par sa construction.
D’après H. et E du Ranquet
Extrait du Bulletin de la Société Archéologique et Historique de la Charente, 1940